Le 24 septembre 2019, malgré une grève de la SNCF qui a quelque peu affecté la participation des personnes inscrites, la question des « dynamiques territoriales de l’ESS » a pu être abordée et discutée à partir de trois contributions de chercheurs.

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Dans un contexte de profonde mutation, le CIRIEC-France engage des débats publics sur les modèles économiques tournés vers l’intérêt collectif, les biens communs et la satisfaction des besoins des individus. Il s’agit d’analyser l’apport des acteurs de la sphère publique et de l’économie sociale et solidaire dans la transition économique, sociale et environnementale, et l’évolution de leur rôle et de leur place dans les territoires.

Les Agoras de l’ESS

Le 24 septembre 2019, malgré une grève de la SNCF qui a quelque peu affecté la participation des personnes inscrites, la question des « dynamiques territoriales de l’ESS » a pu être abordée et discutée à partir de trois contributions de chercheurs.

Cette première AGORA a permis de saisir les différentes dimensions des interactions entre ESS et territoires, en particulier les processus de territorialisation, de construction de solutions originales et de diffusion de celles-ci. Elle a permis, également, d’appréhender la relation existant (ou non) avec les pouvoirs publics dans la construction de solutions locales.

Trois chercheurs ont donc apporté leur regard particulier, au cours d’une table ronde animée par Timothée DUVERGER et Nadine RICHEZ-BATTESTI :

  • Xabier ITÇAINA (CNRS, Centre Emile Durkheim, Sciences Po Bordeaux) qui nous a présenté une approche en termes de régimes territoriaux de l’ESS en proposant d’appliquer une perspective de sciences sociales aux dynamiques territoriales de l’ESS, en prêtant une attention particulière à trois dimensions :

le rôle joué par les héritages historiques dans la constitution des matrices territoriales de l’ESS ;

la façon dont l’ESS s’intègre dans les régulations économiques et politiques territoriales ;

le rôle joué par l’ESS dans la construction et le traitement des problèmes publics territoriaux.

Son analyse s’est appuyée sur des enquêtes qualitatives conduites auprès de dynamiques territoriales d’ESS en Pays basque et en Sud Aquitaine.

  • Laurent FRAISSE (Laboratoire Interdisciplinaire de Sociologue Economique, LISE, CNAM-CNRS) qui a abordé la construction des politiques locales de l’économie sociale et solidaire en France.

Il a montré comment des coalitions d’élus, techniciens, représentants de têtes de réseaux régionales, entrepreneurs et responsables locaux de structures d’accompagnement et de financement ont participé à la consolidation de la terminologie « ESS » qui est une singularité française.

Il a souligné l’importance de l’expérimentation au niveau des collectivités locales pour mener une action publique dédiée à l’ESS. Pour lui, c’est à  partir de ces expérimentations que de nouvelles thématiques et des instruments spécifiques de soutien ont été mis en place sans référence au cadre normatif qu’est devenu la loi-cadre sur l’ESS. Il conclut en soulignant que les politiques de l’ESS se déploient en tension entre une politique de reconnaissance par la mise en place de dispositifs spécifiques et la volonté d’agir en transversalité sur les principaux enjeux du territoire.

Il insiste alors sur le fait que tout cela n’a pu se mettre en place que par des expérimentations de processus de co-construction de l’action publique dont il distingue trois configurations :

La première est une co-construction « corporatiste » dominée par un face à face entre élus et techniciens de la collectivité et les principales têtes de réseau.

La deuxième configuration mixe un processus participatif ouvert à l’ensemble des acteurs intéressés tout en s’appuyant sur des responsables de réseaux légitimes et compétents.

La troisième et dernière configuration inscrit la co-construction des politiques de l’ESS dans le cadre d’instances consultatives locales impliquant des organisations représentatives des milieux économiques et sociaux du territoire.

Il conclut en indiquant que, de manière comparative, les politiques de l’ESS sont plus co-construites et participatives. Surtout, elles ont eu le mérite de nombreuses initiatives et entreprises qui était sous-estimées dans les représentations économiques des élites locales et mal prises en compte dans les instruments des politiques de développement.

  • Elisabetta BUCOLO (sociologue, Maître de Conférence au CNAM, membre du LISE-CNRS) : nous a fait part des travaux menés lors du Colloque de Cerisy de juillet 2019 portant sur « Territoires solidaires en commun : controverses à l’horizon du translocalisme » dont l’objectif était de débattre des questions des territoires solidaires à partir de l’hypothèse d’un translocalisme des communs.

Elle nous indique que les différents intervenants ont questionné notamment les manières dont les solidarités locales autour de diverses ressources (santé, logement, énergie, emploi, culture…) s’articulent aujourd’hui à des solidarités jouant à des échelles territoriales plus larges. Elle souligne que l’on peut considérer que se déploient aujourd’hui sur les territoires des constructions sociales qui relient diverses échelles spatiales, voire temporelles : de l’ancrage local à un élargissement progressif des dimensions, jusqu’à atteindre, parfois, une configuration mondiale.

Elle interroge enfin sur la manière dont ces multiples réalités qui se développent dans les territoires, portées par l’économie sociale et solidaire, le mouvement du libre ou les mouvements sociaux, peuvent ne pas se limiter à panser les plaies des crises écologiques, démocratiques et sociales et à quelles conditions elles peuvent, à l’inverse, faire système selon de multiples échelles autour d’un socle commun de nouvelles solidarités.

Chacune de ces interventions a fait l’objet d’échanges avec la salle et a permis de commencer à tracer des pistes pour les futurs travaux du CIRIEC.